Vendredi 11 août 1944

Lanloup

"Boulsec'h"

B-17G-25-DL

"Luck of Judith Ann"

#42-38073

Codé GH-F

457th BG / 750th BS

(Pilot) S/Lt. Gerald B. Ross. (RTD).

(CP) 2nd Lt. Samuel W. Sayer. (RTD).

(N) 2nd Lt. Chester R. Tingle. (RTD).

(Bdr) F/O. Thomas A. Matassa. (RTD).

(RO) T/Sgt. Hullit O. Kirkhart. (RTD).

(BT) S/Sgt. Thomas S. Maulstesby. (RTD).

(TG) Sgt. Carl A. Adolfson. (RTD).

(LWG) S/Sgt. Richard J. Burdett. (RTD).

(RWG) Sgt. John L. Collins. (RTD).

(TTG) S/Sgt. Camille H. Blais. (RTD).

LANLOUP, Côtes du Nord. Vendredi 11 août 1944. Boulsec'h.

Chute du Bombardier B-17G Immatriculé : 42-38073. Lettre d’empennage U dans triangle blanc. Codé F. '' Luck of Judih Ann'' (Chance de Judith Ann) de la 8th Air Force. 457th Bomber Group Heavy. (Groupe lourd). 750th Bomber squadron.

 

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Les états majors préfigurant la bataille que devraient livrer les Forces alliées pour libérer la ''Festung Brest'' Forteresse de Brest ainsi appelée par les allemands, décidèrent pour ce 11 août 44, le pilonnage des batteries côtières construites par l'occupant sur le pourtour maritime de la rade de Brest et de la presqu’île de Crozon Morgat ainsi que sur la côte Nord du Finistère. La libération de la Bretagne était déjà en marche. L' Est de la région était libéré depuis les premiers jours d’août. Les forces allemandes se réfugiaient sur Lorient et Brest et avaient reçu les ordres d'Hitler de lutter jusqu'au dernier homme. Cette opération aérienne d'envergure, impliquera au total 275 bombardiers B-17 à raison de 10 hommes d'équipage par appareil. Ces B-17 arroserons de bombes les objectifs ,pour un total de 868 tonnes de projectiles. Sur la base RAF 130 de Glatton Huntingdon dans le Comté du Cambridgeshire à environ une centaine de kilomètres au nord de Londres, sont basés depuis le 21 janvier 1944 les 4 squadron du 457th Bomber group, les 748,749,750,751 dont l'effectif en appareil est de 75 quadrimoteurs Boeing B-17.

 

 

Il est 15 heures 30, quand décollent de cette base, 3 ''Box'' de 12 appareils appartenant au 750th Groupe. Après un regroupement au dessus de start point au sud-est de Plymouth à 15 heures 58, ces 36 B-17 vont venir se joindre aux 249 autres bombardiers ayant décollé simultanément de plusieurs bases anglaises et ayant la même mission de destruction des lignes de défenses allemandes de la pointe Bretonne. Le Boeing B-17 ''Luck of Judith Ann'' ainsi appelé par les membres de l'équipage, compte 10 aviateurs. Le pilote est le Second Lieutenant Gérald G. Ross, 24 ans. Il est né le 22 mai 1919 à Sulphur Spring au Texas. Il à, à ses côtés son copilote, le second Lieutenant Samuel W. Sayer, 25 ans, né le 29 octobre 1918 à Muskegon dans le Michigan. Le navigateur est le second lieutenant Chester R. Tingle. Les communications sont assurées par l'opérateur radio le techniqual sergeant Hullit O. Kirkart. Dans la tourelle bulle située en dessous de l'avion, le Sergent Thomas S. Maulstesby est à son poste de tir. La tourelle supérieure est occupée par le sergent Carl A. Adolfson. Dans le couloir menant à l’empennage, la mitrailleuse gauche est servie par le sergent Richard J. Burdett, à ses côtés, le sergent John L. Collins mitrailleur droit. Dans le poste extrême arrière le sergent Camille H. Blais.

 

Photos. ''Collection privée''  

 

Notre formation a prit une direction sud ouest tout d'abord et nous avons volé ensuite un long moment au dessus de la mer. Après une longue courbe bâbord vers 16 heures 40, nous avons contourné la pointe Finistère. Ensuite, nous avons fait cap vers le nord à 16 heures 56 en apercevant nos objectifs, nous avons reçu l'ordre de nous tenir prêt à toute éventualité. Les attaques de chasseurs ennemis nous préoccupaient. Nous scrutions tous le ciel autour de nous. A 17 heures 04, nous volions à la verticale de Crozon. Le Flying Officer Matassa, qui avait préalablement et sur ordre, ouvert la trappe de la soute à bombe, largua une partie du chargement sur une ligne de défense. Nous volions ensuite toujours vers le nord. Il reçu de nouveau l'ordre de délester le reste des bombes, c'est à dire 10 projectiles qui furent largués d'une altitude de 25 000 pieds (7600 mètres) sur une batterie côtière bordant la Manche. Il était 17 heures 08. C'est à ce moment là que notre bombardier fût touché par des obus explosifs tirés par l'artillerie anti aérienne allemande. Notre moteur numéro 3 s’arrêta net. Nous survolions la mer. Le pilote décida immédiatement un retour vers la terre, car le moteur n° 4 se détacha de l'aile après avoir été touché par plusieurs projectiles. Notre appareil poursuivit son vol difficilement dans ces conditions extrêmes. Nous sentions tous que l'avion était perdu. Dans l'interphone, le copilote, le lieutenant Sayer, nous donna l'ordre de nous préparer à sauter en parachute, un nouvel ordre étant attendu pour quitter l'avion. Nous étions prêts et un peu inquiets.''GO ! OK  ! Sautez !''retentit dans tout les hauts parleurs.

 

Photos : http://www.457thbombgroup.org/

 

Le mitrailleur de queue le sergent Adolfson sauta le premier par la porte de côté arrière. Il quitta le B-17 à une altitude de 12000 pieds (3600 mètres environ) et ouvrit son parachute à 3000 pieds (900 mètres). Il atterri dans un champ de maïs en pleine campagne. Une minute après l’atterrissage, un homme armé d'une mitraillette se posta devant lui et l'interpella. Il portait un brassard FFI. Ce dernier le réconforta et lui ordonna de le suivre après qu'il ai abandonné tout son équipement. Il lui trouva un vélo dans une ferme voisine et ils partirent tous les deux vers le bureau de la résistance à Pontrieux ville proche. Le soir même, il fût dirigé vers Guingamp, ville libérée le 7 août où il retrouvera les membres d'une commission américaine des affaires civiles composée de 5 hommes (plus un capitaine Britannique, le captain Sloper) qui avaient été préalablement parachutés dans la région juste avant la libération. Il y retrouvera deux de ses camarades, le lieutenant Chester R. Tingle et le sergent Collins. Ils restèrent 24 heures à Guingamp, puis, embarqués dans un camion, ils furent emmenés à Fougères puis en Normandie, plus exactement à Colleville sur Mer ou le 27th Air T base 27 ATG (A-22C) était installé sur un aérodrome récemment construit pour y recevoir les avions cargos C-47. Ces avions bimoteurs assuraient tous types de transports de fret. Des passagers, des infirmières, le courrier, le plasma sanguin, le sang total, des combattants, des soldats qui retournaient vers l'Angleterre, des gens comme nous et surtout les grands blessés qui étaient redirigés vers les hôpitaux Anglais. Etc....

 

Photos : http://www.457thbombgroup.org/

 

J'ai décollé de cet aérodrome à bord d'un Douglas C-47 le 13 août en cours de journée. En soirée, je me présentais comme prévu au 63 Brook Street à Londres pour y rédiger mon rapport. Le Flying Officer Matassa quittera l'avion en seconde position. C'était sa deuxième mission. Dans son rapport à son retour en Angleterre le 13 août 1944, il déclarera qu'il a sauté sur ordre du pilote à une altitude de 10 000 pieds (3000 mètres environ). Il précise, '' j'ai tiré sur la poignée d'ouverture de mon parachute à 5000 pieds (1500 mètres environ) et j'ai atterri vers 18 heures dans un champ d'herbe''. Je me suis assis sur le sol, il m'a fallut plusieurs minutes pour reprendre mon souffle. Juste après avoir quitté mon harnais de parachute,j'ai été entouré de Français qui n’arrêtaient pas de me dire ''camarade''. Ils m'ont conduit vers une petite maison où j'ai rencontré un homme qui parlait un peu anglais. C'est à partir de chez lui que mon voyage de retour a été programmé. J'appris que j'avais atterri près de Saint Gilles les Bois. Cet homme de petite taille, mince, portant une moustache, qui parlait un anglais approximatif, était l'instituteur du village. En nous rendant chez lui, nous avons rencontré une voiture portant un drapeau Français. Elle était occupée par 3 hommes portant un brassard avec un marquage FFI l'un d'entre eux parlait l'anglais couramment. J'ai cru comprendre qu'il était commissaire. Il s'adressa à moi et me dit que les maquisards encerclaient les allemands dans la région et qu'en traversant une ville la veille, il avait vu un convoi de camions américains. Ces 3 hommes sont partis à la recherche des autres membres de mon équipage dans la région mais en revenant ils annoncèrent n'avoir trouvé personne. En rentrant dans la ville proche, il y avait 5 camions américains et une Jeep qui étaient arrêtés. Le convoi était sous le commandement de 2 lieutenants dépendants du provost marshall de la 3th Compagnie US. Je suis parti dans ce convoi et l'on m'a conduit au quartier général de la 19th aile tactique avancée à Montours en Ille et Vilaine. Le colonel Brown m'a interrogé sur mon unité et sur mon identité avant de m'emmener rencontrer le Général Patton et le Général Gay qui tous deux m'ont demandé de leur raconter ce qui m'était arrivé. Ensuite j'ai été conduit au Quartier Général de la 9th Airforce où le capitaine Luris m'a reçu et m'a donné des ordres ainsi que des consignes et ainsi le 13 août j'ai été dirigé vers un aérodrome en Normandie d’où je me suis envolé à bord d'un C-47 vers Londres. En soirée comme prévu je me suis présenté au 63 Brook Street.

 

Photos : http://www.457thbombgroup.org/

 

Le FO Matassa était originaire de Portola en Californie. Il était cow boy dans le ranch familial. Le second lieutenant Chester R. Tingle, qui était le bombardier de l'équipage, sauta le troisième d'une altitude de 11500 pieds, et atterri dans un champ de blé au bord d'un ravin prés de Pontrieux. Il fut accueilli par des français armés qui lui on dit que les allemands étaient à une dizaine de kilomètres et qu'il devait les suivre. Il fut conduit par les résistants à leur bureau situé en ville puis peu après à Guingamp où il attendit pour rejoindre un aérodrome en Normandie et se rendre à Londres. Le Sergent Camille Blais, ingénieur dans le civil, engagé pour 2ans et demi, sauta en quatrième position. Il ouvrit son parachute à une altitude de 3000 pieds. Il précise ''j'ai atterri dans un champ à la périphérie de Pontrieux. J'ai été recueilli par 3 patriotes armés de mitraillette. Ils m'ont emmené au bureau de la résistance et de la j'ai été conduit à Guingamp où j'ai retrouvé un camarade. Le sergent Collins suivit le même parcours. Il avait sauté en cinquième position et avait atterri près d’une ferme dans la campagne autour de Pontrieux. Il fut aidé et conduit à Guingamp. Le Sergent Thomas Maulstesby quitta le bombardier en sixième position. Après un saut en parachute sans problème, il arriva brutalement dans un champ, se brisant une cheville. Des gens qui l'avaient vu tomber, vinrent lui porter secours. Il fût dirigé vers l’hôpital civil de Guingamp. Le sergent Kirkart fut le septième à sauter en parachute, ouvert à 4000 pieds ( 1200m environ) se posant sans problème. Aidé par des résistants, il rejoignit ses camarades à Guingamp. Le sergent Richard Burdett sauta en huitième position. Aucune note n'est jointe dans le rapport de l'équipage à son sujet. Le neuvième homme qui quitta le bombardier fut le Flying Officer Samuel Sayer copilote du B-17. Il précise ''j'ai atterri dans un champ au nord de Guingamp entre la ville et la côte. J'ai été recueilli par deux Français qui mon emmené dans leur ferme. Ils m'ont donné à manger et ensuite, ils m'ont conduit dans une petite ville du nom de Lanvollon. Cette zone était libérée et contrôlée par le maquis. En soirée j'ai été conduis devant une commission américaine des affaires civiles qui se tenait à Guingamp. J'ai retrouvé des camarades qui étaient déjà sur place. J'ai passé la nuit chez un notaire monsieur Leclerc. Le lendemain nous avons été dirigés en camion vers l’Etat major du 8th Corps au sud de Saint Malo (nom de code US. Monarque). Le lendemain avec nos camarades, nous avons rejoins, à bord de 2 avions Piper L-5 ,le 19th Tactical Airforce en Nord Cotentin. Un C-47 nous ramena en Angleterre le 13 août. Le pilote, le second lieutenant Gérald Ross quitta l'avion en dernier, il arriva au sol près de Lanvollon mais ne retrouva pas le lieutenant Sayer. Aidé par des fermiers, il fut récupéré par des résistants qui le conduisirent à Guingamp où il retrouva le le lieutenant Roos qui venait lui aussi d'arriver en ce lieu. Il passa la nuit également chez le notaire monsieur Leclerc. Ils rejoignirent l’Angleterre ensembles avec tous leurs camarades sauf Maulstesby qui resta hospitalisé quelques jours avant son rapatriement vers Londres dans les jours qui suivirent.

 

 

 

Témoignage de Monsieur Raymond LEBARS de Kerdreux en PLOUHA

 

Mes parents agriculteurs avaient prit l'exploitation de la ferme de Kerdreux au cours l'année 1943. Nous habitions dans le manoir tout proche. Nous devions partager notre habitation avec des soldats de l'armée d'occupation, des russes blancs, dont plusieurs étaient âgés. Ils s'occupaient de leurs chevaux qu'ils logeaient dans nos étables en face de chez nous. Nous n'avions pas de problème particuliers avec eux.

Ce 11 août 1944 en milieu d’après midi, j'accompagnais plusieurs adultes qui allaient chercher de la paille dans notre grand champ qui venait d'être moissonné. Les jours précédents les gerbes de blé avaient été mises en javelles. Nous étions tous dans une charrette tirée par un cheval et parcourions le chemin qui va de la ferme à ce champ quand soudain on entendit un bruit qui attira l'attention de tous. On vit un gros avion qui venait du sud ouest et abattait la cime des arbres dans le bois sur notre droite. Nous fûmes surpris devant un tel spectacle. Juste devant nous, l'avion percuta violemment le sol du champ où nous devions justement nous rendre puis il rebondit, traversa le talus qui bordait la voie ferrée du petit train qui passait juste à cet endroit à cette époque. L'avion fit encore une centaine de mètres et vira sur la gauche avant de s'immobiliser. Il était tourné vers la mer toute proche. Dans le choc, il avait perdu un de ses moteurs qui fut retrouvé en bas du champ. Aussitôt nous avons été voir cet avion. Nous hésitions à approcher de peur qu'il explose. Ce ne fut pas le cas heureusement. Il ne prit pas feu non plus. On peut dire qu'il était tombé près du village de Boulserc'h en Lanloup. Après avoir touché la cime des arbres il fit environ un kilomètre. Il est probable qu'avant de quitter le bombardier, le pilote le dirigea vers la mer toute proche, en pilotage automatique mais sa trajectoire fut déviée par le contact avec la cime des arbres.

 

Site du crash dans le champ de Boulsec'h

Remerciements à Monsieur Raymond Lebars ; Monsieur Pierre Yves Lebars, Monsieur Jean Yves Le Meur. Merci à Madame Véronique Veyrié membre ABSA 39-45 pour son travail de traduction.

Sources MACR Missing air crew report : Les carnets du Goélo Numéro 17 Année 2001, récit de Monsieur Gordon Carter.

Jean Michel Martin ABSA 39-45 - Avril 2014

 

Pièces. Bomb rack. Manille de sécurité pour les bombes
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Pièces du volet sustentateur
Photos pièces. ''Collection privée''