8 mars 1943. Témoignage de Monsieur André Defin habitant le village de "Beauvais" en Bréhand.

Je me rappelle très bien de cette journée. Il faisait très beau, le ciel était très clair, d’un bleu azur. C’était le début de l’après midi. Mon frère Louis avait entrepris de me couper les cheveux. J’étais assis à l’envers sur une chaise au milieu de la cour, les bras appuyés sur le dossier. Soudain nous avons entendu un ronronnement sourd très haut dans le ciel. L‘air semblait vibrer. Ils s’en dégageait un bruit assourdissant. Nous avons sût que c’était des avions car à cette époque s’était très courant. Nous n’arrivions pas à les voir car ils étaient à une altitude élevée. Après guerre un des aviateurs vint nous rendre visite et il nous dit que les avions ce jour la volaient à 7000 mètres. (Sergent Ernest Moriarty).

En insistant nous avons pu apercevoir plusieurs dizaines de bombardiers qui volaient en formation serrée. Soudain on entendit le bruit des tirs d’avions ennemis. Les chasseurs à cette époque volaient à grande vitesse y compris en rase motte. Les attaques se sont succédées, quand tout d’un coup nous en avons vu un qui se détachait du groupe. Il baissait en altitude et se trouvait à la traîne. Il avait du être touché car un panache de fumée noire s’échappait d’un moteur. Nous suivions l’évolution de cette tragique situation quand, tout à coup on aperçu quelque chose qui tombait en spirale, brillant par alternance dans le soleil comme un miroir et qui manifestement venait de ce bombardier en détresse. Nous avons pensé à une bombe, mais arrivé au sol aucune explosion ne se fit entendre. Immédiatement de notre verger derrière la maison on entendit un bruit sec, comme un claquement. Nous avons eus peur, mais rien n’arriva. Notre regard se portait toujours sur l’avion dont on voyait s’échapper les corolles blanches des parachutes. Il en avait plusieurs qui descendaient tranquillement en se balançant. L’avion disparu de notre vision. Les allemands étaient devenus fous. Ils couraient partout. De notre village nous avons voulu nous rendre compte de ce qui était tombé un peu plus loin, au village de "Beauvais" en Trébry, nous n’avions pas été seuls à assister à ce drame une dizaine de personnes se rendirent sur les lieux. Là au milieu du pré gisait un grand rectangle de couleur kaki avec une fenêtre et une poignée. Prudemment avec une perche on toucha ce qui se révéla être la porte de l’avion, par peur des Allemands personne ne voulait la récupérer. Mon frère décida de l’emmener discrètement chez nous. Ce qu’il fit. A l’intérieur l’aluminium était très brillant. La vitre était en plexiglas. Des enfants cassèrent cette vitre en jouant avec la porte.

 

La porte à été retrouvée au milieu de ce champ à Beauvais en Trébry. La famille Defin présente la porte du B-17 récupérée le 8 mars 1943

 

En soirée mon frère et moi avons voulu voir ce qui était tombé dans le verger. Nous avons cherché un moment, puis un casque de couleur vert kaki avec deux écouteurs fut découvert sous un pommier. Il portait des traces de sang. Les gendarmes le récupérèrent les jours suivants. Un aviateur atterri pas loin de chez nous au lieu dit "La cabane". Il était blessé et perdait son sang. Il semble qu’il avait été touché par un projectile parti du sol. Il fut couché dans un lit chez un riverain du lieu et vu son état les allemands l’emmenèrent vers l’hôpital. Un autre aviateur tomba dans une lande de genêts au lieu dit "Le Vaudehay" près de "Corbière". Il était très grand je crois qu‘il avait un grade. Il souffrait d’une jambe, une dame proposa de l’héberger chez elle mais ce ne fût que pour un cours moment car sa blessure l’obligea à se rendre aux allemands. A l’hôpital on lui annonça sa fracture. Son parachute avait été emmené par deux jeunes qui souhaitaient que l’on leur fasse des chemises dans la toile. A cette époque on manquait de tout. Très vite la gendarmerie, bien renseignée vint récupérer ce parachute. Voilà ce dont je me rappelle à ce sujet.

 

Louis Marie Constant DEFIN naît le 23 décembre 1921 à Bréhand (22).

 

Il est le fils de Louis DEFIN et Marie Joseph GLATRE. Sa mère a perdu 2 frères à la guerre 1914-1918 : François et Mathurin GLÂTRE. La famille habite à Beauvais à Bréhand. Louis a une soeur ainée née la même année que lui et deux frères prénommés Pierre et André.

 

Il est cultivateur. Pendant la guerre, il est réfractaire au Service du Travail Obligatoire (S.T.O.). Il rejoint la Résistance fin juillet/début août 1944 (au moment de la Libération) au sein des F.T.P.F. du Bataillon Valmy. Le 17 août, il s'engage volontairement pour poursuivre le combat. Il est intégré à la 3e Cie. Le Bataillon Valmy prend position le 7 septembre 1944 à Sainte-Hélène (56) sur le front de Lorient (56). Louis DEFIN est gravement blessé aux intestins par éclats d'obus le 8 septembre à Nostang (56). Il est transporté à l'hôpital d'Auray (56) où il décède dans la souffrance le 16 septembre 1944 à 19h30. Il est homologué à titre posthume au grade de soldat 2ème classe.

Sa mère va chercher le corps avec une charette à Auray. Il est ensuite inhumé solennellement au cimetière communal de Bréhand où il repose toujours.

Un tableau commémoratif réalisé en son honneur est conservé par son neveu Denis DEFIN ainsi qu'un cadre commémoratif par sa nièce Françoise GIQUEL.

Son nom est inscrit sur le monument commémoratif de La Vallée à Trédaniel (22) (nom DEFFIN) et sur le Monument Aux Morts de Bréhand.

 

Sources

ADCA 2W236 Enquête mairie Bréhand

Dossier Vincennes

Dossier DAVCC

http://www.absa3945.com

Ami entends-tu n°125

Entretien avec son neveu Denis DEFIN (entretien du 12 novembre 2016)

Documents familiaux et informations fournies par sa nièce Françoise GIQUEL (échanges par mails les 12 et 13 novembre 2016)

Jimmy TUAL, membre Les Amis de la Fondation pour la Mémoire de la Déportation des Côtes D'Armor et de l'ABSA - novembre 2016

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